les principES MAçONNIQUES
Introduction
La présente notice est destinée aux profanes qui s’intéressent sérieusement à la Franc-maçonnerie. Les francs-maçons appellent profanes les personnes n’appartenant pas à leur Ordre.
Les raisons qui poussent un homme à s’intéresser à l’Ordre maçonnique peuvent être fort diverses, et cette notice n’ambitionne pas d’en dresser la liste. En revanche, il est du devoir de la Franc-maçonnerie de renseigner un candidat éventuel sur ce qu’elle est, et partant, sur ce qu’elle n’est pas.
Une telle information ne saurait d’ailleurs être complète ou définitive. En effet, chaque membre de l’Ordre a une conception plus on moins personnelle de la Franc-maçonnerie, conception influencée par divers facteurs (âge et expérience maçonniques, fonction du grade), intellectuel (tournure d’esprit, intérêt moral ou spirituel, convictions théologiques on philosophiques) et social (ambiance de la loge, marque de l’époque et du milieu social).
Aussi sommes-nous conscients du caractère succinct et partiel de la présente notice. Chacun a la possibilité de compléter son information, par des entretiens avec un franc-maçon et par la lecture de quelques-uns des dizaines de milliers de livres traitant du sujet. Les bons ouvrages ne sont pas rares, dans des éditions très accessibles. On aura intérêt à se faire indiquer quelques titres par un franc-maçon averti, sans craindre les ouvrages des thuriféraires ni ceux des détracteurs.
On se souviendra toutefois que :
Pour le public, un franc-maçon
Sera toujours un vrai problème
Qu’il ne saurait résoudre à fond
Qu’en devenant maçon lui-même.
(F. Ricault, Paris, 1737)
Esquisse d’une théorie de l’initiation
Lorsqu’un profane s’intéresse à la Franc-maçonnerie au point d’envisager d’y solliciter son admission, il pressent en elle un élément fondamental. qu’il ne saurait trouver ailleurs. Cet élément fondamental est l’initiation, qui confère à la Franc-maçonnerie son caractère spécifique, et qui, par cela même, la distingue radicalement de toute autre institution. La difficulté réside pour lui, dans le lien, indissoluble existant entre franc-maçonnerie et initiation. Celle-ci est précisément liée l’admission dans l’institution, de sorte qu’on ne peut connaître l’initiation sans la « vivre ». Or, demander à un profane d’adhérer à la Franc-maçonnerie en raison de l’élément essentiel qu’il pense pouvoir y trouver c’est lui demander en fait, de s’engager dans une voie qu’il ne connaît pas.
Un profane connaissant l’existence de l’initiation maçonnique, fonde 1a conception qu’il s’en fait sur des observations et des appréciation, extérieures à cette initiation proprement dite. Il ne peut en être autrement Ces observations, cette appréciation varieront d’un profane à un autre, et fonction de ses lectures, des contacts qu’il aura eu avec un ou plusieurs francs-maçons et des exemples que ceux-ci lui auront donné.
On peut aborder l’initiation par diverse côtés. Il sera de peu de secours, au profane de lui dire qu’elle est une expérience personnelle d’ordre spirituel, et par cela même, incommunicable. En revanche, si l’on veut bien se refermer à l’étymologie, on gardera présent à l’esprit que initiation est un commencement: le commencement d’une évolution ordre spirituel, marqué par une cérémonie particulière destinée à éveiller chez le candidat la conscience des potentialités qu’il porte en lui.
Ce processus présuppose deux choses: tout d’abord que l’être humain est capable d’évoluer, de se perfectionner, et ensuite, que la cérémonie de l’initiation est susceptible de transmettre au néophyte un dynamisme favorisant son évolution et son perfectionnement.
Cette initiation maçonnique n’est pas une cérémonie quelconque déployant automatiquement ses effets sur n’importe quel profane. Elle exige de celui qui la sollicite, certaines prédispositions, certaine tournures d’esprit et une sensibilité particulière à la symbolique qui en est 1e support.
Au lieu de cérémonie, il conviendrait plutôt de parler de «rituel». L’axe du rituel d’initiation est tracé par une ligne idéale, dont le point de départ serait la préparation du candidat, préparation destinée à l’intégrer dans l’œuvre de construction déjà entreprise par les francs-maçons, et dont le terme serait le dégagement de la forme parfaite et harmonieuse qu’il recelait à l’état potentiel. Cet axe, ce processus, ne sont rien d’autre que le schéma, emprunté a l’art de construire, de la réalisation spirituelle de l’homme.
Autour de cet axe, se sont groupés des éléments provenant de courants de pensées, ou plus exactement, de diverses traditions. Leur apport, loin de contredire ou de nier l’efficacité de l’axe du constructivisme, l’enrichit en lui offrant des développements quasi illimités. Tout se passe comme si à un leitmotiv fondamental, des compositeurs connus ou inconnus avaient ajouté des variations dans des registres différents.
La richesse même du rituel d’initiation au grade d’apprenti constitue un obstacle à sa compréhension totale et immédiate, parce que la sensibilité, la réceptivité, la possibilité de réalisation du néophyte «vivant» l’initiation, ne lui permettent d’en percevoir que quelques aspects. Il en résulte que l’initiation demeure virtuelle, et que seul un effort soutenu dans le temps permet au franc-maçon d’en réaliser les modalités.
Cette réalisation emprunte divers moyens, principalement la participation attentive « de cœur et d’esprit» à l’initiation d’autres profanes. L’apprenti revit ainsi sa propre initiation par personne interposée, et en découvre des aspects qui lui avaient tout d’abord échappé.
Dans son essence, le rituel d’initiation au grade d’apprenti recèle l’alpha et l’oméga de l’enseignement maçonnique. Mais par sa nature, Synthétique, par ses formes symboliques, cet enseignement n’est pas susceptible d’être intégré immédiatement par le néophyte, qui n’en perçoit d’abord que l’expression matérielle et extérieure.
Les possibilités de développement spirituel illimitées, offertes par ce rituel, dépassent les moyens ordinaires d’assimilation d’un homme dont l’attention et l’intérêt sont sollicités sans cesse par une vie profane de plus en plus accaparante. C’est pourquoi, à l’initiation fondamentale s’ajoutent et se superposent, par la suite, des rituels qui reprennent le schéma premier en le développant dans des perspectives différentes.
Les « travaux » présentés en loge, les entretiens, les lectures, sont autant de moyens de réaliser l’initiation. Les expériences faites dans le domaine maçonnique ou profane apportent aussi à l’initié un matériel qu’il doit constamment soumettre au crible de sa raison et confronter à sa vision personnelle.
L’initiation présente donc un double aspect: elle est une cérémonie, un rituel, mais elle est aussi une expérience personnelle d’ordre spirituel. C’est ce deuxième aspect qui la rend «secrète» ou plus exactement incommunicable. En effet, les réalités d’ordre spirituel ne sont pas exprimables par le langage ordinaire; leur qualité d’expériences intérieures, intimes, est propre aux régions les plus profondes de l’être. Elles appartiennent au patrimoine spirituel de l’humanité, et en tant que telles, échappent à une formulation en termes strictement rationnels. Elles constituent le fond commun à toutes les traditions, religieuses ou initiatiques.
En revanche, si ces réalités d’ordre spirituel ne sont pas exprimables, les formes et les représentations par lesquelles l’esprit humain les traduit, sont accessibles à la raison.
L’initiation et l’initié
Ayant envisagé l’initiation d’un point de vue « intérieur », il faut maintenant aborder sommairement le problème dans une autre direction : quelles sont les conséquences qui découlent du fait que chaque franc-maçon à été initié?
La première, qui est fondamentale et constitue le principe des suivantes, est que l’initiation représente le lien par lequel tous les francs-maçons se reconnaissent comme « frères ». De même que l’on peut parler de frères d’armes, frères de sang, on peut parler de «frères selon l’initiation». C’est l’initiation qui constitue l’origine et le principe de la « fraternité ».
Les efforts déployés par chaque franc-maçon pour réaliser l’initiation, s’orientent tout naturellement en suivant l’axe ou processus décrit ci-dessus. La somme de ces efforts individuels donne à la loge une ambiance particulière, et fait d’elle un foyer où convergent et d’où partent des forces dont l’intensité dépasse la seule addition des énergies déployées par chaque frère. C’est pourquoi, il est important que l’initiation soit comprise correctement, afin que le « travail » des francs-maçons s’accomplisse selon la juste orientation.
Les variations dans la manière de concevoir l’initiation influencent dans une large mesure l’ambiance d’une loge et la qualité des travaux qui y sont fait. Chaque profane désireux d’accorder à ces choses l’importance qu’elles ont, devrait non seulement être informé des caractéristiques de la loge de son parrain, mais aussi avoir la possibilité effective (et non point théorique) de demander son admission dans un atelier correspondant mieux à ce qu’il attend de la Franc-maçonnerie.
La fraternité, c’est-à-dire le lien créé entre les frères par l’initiation commune, est la condition de base de deux principes: l’amitié fraternelle et la liberté.
Par amitié fraternelle, il faut entendre le préjugé favorable du frère envers son frère, disposition naturelle du franc-maçon à rechercher ce qui rapproche plutôt que ce qui éloigne. Dans tout frère le franc-maçon verra un autre lui-même, tendu vers un même but: la perfection. Conscient de ses propres défaillances, il ne s’attardera pas à celles de son frère, et tout naturellement, attendra la même patience et la même compréhension pour lui-même.
De plus, le franc-maçon sera amené à reconnaître que si la perfection est un but dont le principe est identique pour tous, les moyens d’y tendre peuvent varier d’un individu à un autre. La voie qu’il empruntera, en fonction de sa personnalité, se distinguera de celle utilisée par d’autres, constatation qui le conduira à respecter des efforts différents des siens. Par voie de conséquence, il accordera à autrui la liberté qu’il demande pour lui-même. Cette liberté est l’un des fruits de l’initiation: elle est ni licence ni indifférence, mais respect réciproque.
Il ne peut en être autrement dans une organisation authentiquement traditionnelle. En effet, les rites et les symboles, qui sont les supports de l’initiation, exercent un rayonnement auxquels les initiés réagissent selon leur personnalité, le degré de leur compréhension et leur sensibilité. C’est pourquoi, il ne peut y avoir, dans la Franc-maçonnerie, de magister autorisé à définir une doctrine et à en fixer les éléments. L’application des principes maçonniques d’amitié fraternelle, de liberté, de tolérance et de respect du prochain, ne sauraient se limiter aux rapports entre frères à l’intérieur de la loge et pendant les travaux et les réunions.
Bien que ne professant pas de morale particulière, la Franc-maçonnerie considère que ses membres ont le devoir de se porter des sentiments d’estime réciproque et de se venir en aide.
On a beaucoup critiqué cette dernière obligation morale, soit que les profanes n’en aient pas compris le sens, soit que les francs-maçons eux-mêmes en aient dénaturé la portée et la signification. Le devoir d’entraide ne s’applique qu’à des circonstances ne mettant pas en cause l’honneur et la bonne foi des francs-maçons. On ne saurait trop rappeler aux profanes que la Franc-maçonnerie n’est ni une amicale, ni une organisation destinée à favoriser les entreprises commerciales ou les desseins intéressés de ses membres. D’autres sociétés sont à cet égard mieux équipées pour rendre ce genre de services!
En revanche, les limites dans le devoir d’entraide seront celles-1à mêmes que chaque frère se tracera. Il est d’ailleurs plusieurs façons d’aider, les plus efficaces ne sont pas toujours les plus visibles et les plus spectaculaires.
Les sentiments que le franc-maçon destine en premier lieu à ses frères il les concrétisera pareillement à l’égard des profanes, en accordant une priorité à sa famille, à ses proches, à ses amis et à ses concitoyens. Franc-maçon en loge, il le sera aussi dans les diverses circonstances de la vie s’efforçant d’accomplir au plus près de sa conscience le devoir qu’on attend de lui.
A la différence des membres d’un ordre monastique, le franc-maçon vit dans le monde et est, par conséquent, plus ou moins engagé dans les multiples activités humaines. La Franc-maçonnerie ne lui demande ni de vivre comme un saint ou un ermite, ni de militer dans une organisation sociale, politique ou religieuse. Elle lui demande d’être conséquent avec lui-même, et pour cela de bien se connaître, afin de discerner ses possibilités, mais ses limites aussi. Elle lui laisse la responsabilité personnelle des opinions qu’il professe, souhaitant seulement qu’il se souvienne de sa qualité de franc-maçon. Elle n’intervient pas dans ses engagements sociaux, politiques ou religieux, exigeant pourtant qu’ils n’aliènent ni sa liberté ni ne compromettent l’Ordre maçonnique.
Ces conditions observées, le franc-maçon est libre de s’associer, à titre personnel et sans nécessairement révéler son appartenance, à toute action susceptible d’améliorer le sort matériel, moral et spirituel de ses contemporains et de l’humanité.
But de la Franc-maçonnerie
Le but de l’Ordre maçonnique ne doit pas être confondu avec les objectifs poursuivis par les francs-maçons.
Ceux-ci sont des individus, conditionnés par leur personnalité, leur éducation et l’époque, quels que soient leur influence sur les événements ou leur rayonnement sur leurs contemporains, ils sont cependant faillibles et mortels. Il n’en est pas de même pour l’Ordre maçonnique, qui, par sa nature, demeure et doit demeurer en dehors et au-delà du tumulte de la vie profane. Plus une obédience lie son sort à une doctrine ou à un régime social ou politique, plus elle s’engage dans le domaine du contingent et du relatif. A l’extrême, on pourrait craindre sa disparition, en même temps que disparaîtrait la doctrine (politique ou religieuse) ou le régime avec lesquels elle se serait identifiée.
L’Ordre maçonnique représente en Occident ce que la Tradition a maintenu de plus durable et de plus valable. Sa mission première et essentielle consiste à préserver ce dépôt de toute atteinte profane, de toute dégénérescence et de toute compromission. La nature du dépôt traditionnel étant d’ordre spirituel, c’est-à-dire se situant au-delà de toute formulation dogmatique et de tout système philosophique, le protège dans une certaine mesure contre les attaques du monde profane. Mais en même temps, elle expose la Franc-maçonnerie à l’incompréhension des sectaires, à la curiosité stérile du vulgaire et au mépris des esprits superficiels. C’est pourquoi elle a, de tous temps, pris soin de garder le silence sur les formes particulières de son enseignement.
Mais si la Franc-maçonnerie entend ne pas galvauder l’enseignement traditionnel dont elle est dépositaire, elle ne commet pas l’erreur inverse qui consisterait à l’envelopper de bandelettes et à l’embaumer comme une momie inutile, à le conserver égoïstement, tel un trésor caché, pour le seul usage de ses membres.
Elle a et a toujours eu pour ambition de préserver la pureté de cet héritage spirituel, mais dans le but d’en faire profiter l’humanité. Observant avec attention l’évolution du monde, elle s’efforce d’en discerner les tournants et les étapes, afin de tenter d’en orienter le cours en vue de fins meilleures.
Il serait d’ailleurs fallacieux de chercher la trace de cette influence dans les événements offerts en pâture, à une opinion publique égarée, mais il serait plus équitable de la discerner à travers les mille petits faits qui peuvent inspirer une réelle confiance dans le devenir de l’homme.
Certes, la Franc-maçonnerie n’a pas la prétention de monopoliser tous les bienfaits accomplis en ce monde, mais elle s’associe toujours de cœur et de pensée, à tout ce qui élève l’homme et lui permet de mieux accomplir son destin.
Organisation de la Franc-maçonnerie
Contrairement à ce qu’on a pu prétendre, cette organisation n’est pas secrète. Certaines obédiences publient non seulement leurs statuts, mais parfois même la liste de leurs membres ou tout au moins de leurs dirigeants.
La cellule de base de la Franc-maçonnerie est la Loge ou Atelier. Chaque Loge s’administre elle-même dans le cadre des règles générales fixées pour l’Obédience c’est-à-dire pour la fédération des Loges dont elle se réclame.
Cette fédération est appelée suivant les pays, Grande Loge ou Grand Orient.
A époques fixes, les délégués des Loges mandatent certains d’entre eux pour accomplir les tâches propres à l’Obédience notamment en ce qui concerne le maintien de l’unité et la conservation des principes maçonniques. Les dirigeants de l’obédience sont comptables de leur gestion devant les délégués des Loges fédérées. Les Obédiences sont de plus, chargées de l’administration générale de l’Ordre maçonnique.
Elles peuvent entretenir entre elles des relations plus on moins étroites; certaines cependant, pour des raisons diverses, sont considérées comme irrégulières et demeurent à l’écart de ces relations.
En principe, il n’existe qu’une seule juridiction maçonnique de Saint-Jean dans chaque pays.
La Loge, dite Loge de Saint-Jean ou Loge bleue, désigne en son sein un comité responsable. Elle confère les trois degrés de la Franc-maçonnerie de Saint-Jean, soit le premier ou Grade d’Apprenti, le deuxième ou Grade de Compagnon, le troisième et dernier ou Grade de Maître. Seuls les Frères revêtus du Grade de Maître peuvent remplir une charge au comité de la Loge ou de la Grande Loge.
Les Frères ayant atteint le 3e degré peuvent poursuivre leur activité et leurs recherches maçonniques dans des organisations appelées Hauts Grades ou Ateliers Supérieurs. Ceux-ci sont les éléments premiers d’un système maçonnique nettement distinct de la Grande Loge tant dans son organisation que dans son administration.
Les membres de ces Ateliers sont recrutés par cooptation parmi les Maîtres Maçons des diverses Loges bleues et ne jouissent d’aucune prérogative particulière au sein de celles-ci.
Aperçu sur ses origines et son histoire
Le problème de l’origine historique de la Franc-Maçonnerie est l’une des plus ardus à résoudre. On ne peut aborder cette histoire comme le ferait un chartiste, faute de quoi on se condamnerait à n’avoir d’elle qu’une image tronquée et incomplète. Il y a à cette impossibilité deux causes principales. Tout d’abord, la Franc-Maçonnerie a deux côtés ou faces: l’une tournée vers l’extérieur, vers le monde, c’est son aspect «institution», l’autre tournée vers l’intérieur, c’est son aspect «expérience individuelle d’ordre spirituel». Ce genre d’expériences n’est que difficilement communicable dans un langage discursif. De plus, pour ce qui est de l’institution, il faut se rendre à l’évidence que des documents ont été détruits; ceux subsistant ne sont pas tous en mains de personnes capables de les comprendre et de les interpréter.
L’autre raison pour laquelle il est impossible d’écrire une histoire complète et scientifiquement exacte de la Franc-Maçonnerie tient au fait que le propre d’une tradition est d’être transmise oralement. Il n’y a d’ailleurs que deux siècles environ que des documents maçonniques son publiés. Du silence de textes antérieurs, on ne peut inférer la non existence de la Franc-Maçonnerie.
C’est pour ces raisons que nous avons jugé plus expédient d’aborder le problème de l’initiation avant celui de l’histoire. Il nous a paru préférable d’envisager cette histoire en fonction d’une conception de l’initiation (Chacun étant libre d’adhérer ou non à cette conception!). La démarche inverse aurait consisté à expliquer l’initiation par l’histoire de la Franc-Maçonnerie. Une telle méthode présenterait l’inconvénient majeur de réduire l’initiation aux dimensions nécessairement étroites des données historiques incapables de rendre compte de toute la réalité.
A la discipline exigeante d’une science historique ne pouvant rendre compte de l’aspect intérieur de la Franc-Maçonnerie, nous préférons recourir à une hypothèse fondamentale. Cette hypothèse se fonde sur le postulat suivant: l’initiation est une dans le temps et dans l’espace. La Franc-maçonnerie transmet cette initiation, sous une forme particulière liée à la tradition dont elle relève. La tradition maçonnique est l’une des modalités, particularisée par les conditions qui l’ont vu naître, d’une Tradition unique et immémoriale. Cette Tradition primordiale, dont toutes les traditions sont issues par application dans l’ordre contingent, contient à l’état principal et potentiel les possibilités de réaliser le devenir spirituel de l’homme.
Si l’on tient cette hypothèse pour valable, on comprendra qu’Anderson, rédigeant en 1723 les Constitutions qui portent son nom, fasse remonter l’origine de l’Ordre maçonnique à Adam, « qui enseigna la géométrie à ses fils ». On comprendra aussi que, développant logiquement la légende, il relate la transmission des notions maçonniques à Noé, puis aux Égyptiens, aux Grecs, aux Romains et enfin aux Saxons. On le comprendra par un effort de l’imagination, comme on pénètre le sens caché et profond d’une légende; parce que cette légende n’a d’autre intention que de suggérer, d’une façon allégorique, que l’Ordre maçonnique n’a pas d’origine humaine décelable. Cette origine non humaine, affirmée par certains rituels, est la marque d’une organisation initiatique rattachée à une tradition.
La géométrie qu’Adam est censé avoir enseignée à ses fils, doit être envisagée non pas seulement comme la science exacte que nous connaissons actuellement, mais surtout comme le compendium de la Connaissance ou vraie science, déposé dans le cœur de l’homme par le Créateur. Cette Connaissance représente le contenu spirituel de la Tradition, et il est dès lors aisé de comprendre que l’initié en conçoive la transmission jusqu’aux francs-maçons de ce siècle, à travers les collèges de constructeurs antiques et les corporations médiévales.
L’histoire d’une organisation initiatique est en partie publique et en partie secrète. Elle est publique dans la mesure où le côté institutionnel d’une telle organisation la fait connaître du public. Elle est secrète par son côté intérieur, touchant à sa raison d’être profonde, échappant par nature à toute divulgation et à toute expression littéraire. C’est pourquoi, l’historien non maçon aura toujours la plus grande difficulté à poser et à résoudre le vrai problème, c’est-à-dire à appréhender la Franc-maçonnerie « de l’intérieur ».
Il est un certain nombre de points sur lesquels l’histoire maçonnique et l’histoire profane ne se contredisent pas. Cependant si la matérialité de certains faits n’est contestée ni par l’une ni par l’autre, il est compréhensible que des divergences de vues puissent se manifester quant à leur interprétation.
Le fond et la forme
L’organisation corporative du travail est apparue très tôt dans l’Antiquité. Le caractère sacré du travail, comme d’ailleurs de tous les actes de la vie, la difficulté de l’art de construire, exigeant des connaissances spéciales, créèrent les conditions propres à la constitution d’associations de constructeurs. Le Livre des Rois nous apprend l’existence d’une organisation et d’une hiérarchie professionnelles chez les constructeurs du Temple de Jérusalem, sous Salomon.
En Europe, on assiste à la fondation de Cîteaux en 1098. La Chrétienté médiévale entre dans une phase ascendante, marquée par les débuts du premier art roman. C’est à cette époque, aussi, que l’on constate l’apparition des premières guildes anglaises de métiers (1110 – 1133), sous Henri 1er. En 1118 est fondé l’Ordre des Templiers, dont les moines soldats guerroyant contre les Musulmans assiégeant les Lieux Saints. A leurs contacts, et pendant les périodes d’accalmie, ils s’imprégnèrent des conceptions philosophiques et ésotériques de l’Islam.
En 1326, le Concile d’Avignon condamne les fraternités et les confréries, dont les pratiques, les insignes et le langage secret lui paraissent menacer l’orthodoxie de la foi. On attribue à la fin du XIVe siècle le manuscrit Hallywell, premier document connu attestant l’existence de la Franc-Maçonnerie opérative anglaise. En 1479 et en 1564, les tailleurs de pierre allemands se réunissent, édictent ou renouvellent certaines règles. En 1600, le procès-verbal d’une loge d’Édimbourg relate qu’un personnage n’exerçant pas le métier, est reçu franc-maçon. En 1646, c’est l’alchimiste Ashmole, de confession catholique, qui devient « Maçon Accepté », bien que n’étant pas maçon de métier.
Lors de l’avènement de Charles II d’Angleterre en 1660, est créée la « Royal Society », destinée à promouvoir le goût des sciences naturelles parmi les gens de bonne éducation et dégagée de toute contrainte religieuse ou philosophique. De 1666 à 1717, sir Christopher Wren, architecte de la cathédrale de Saint-Paul, assume la dernière grande-maîtrise des maçons opératifs à Londres.
La fin du XIIIe siècle marque le déclin de la ferveur religieuse ayant inspiré l’édification des cathédrales. Les confréries de bâtisseurs, intimement liées à la vie religieuse de l’époque, obéissent d’abord à un réflexe d’autodéfense, en réservant leurs avantages matériels et moraux à leurs seuls membres. Mais ultérieurement, le dépérissement de l’art religieux de la construction restreint progressivement la base « opérative » des confréries et des guildes, et, par un processus inverse, les incite à accueillir des personnages étrangers aux métiers. Les vieilles organisations de métiers atteignaient ainsi un but double: d’une part, elles s’adaptaient tant bien que mal à des conditions nouvelles, d’autre part, elles s’assuraient l’apport et le patronage de personnages éminents: nobles, savants, chercheurs, philosophes.
L’antique maçonnerie assurait ainsi sa survie, au prix d’une métamorphose. Tout se passe comme si, par un ultime effort d’adaptation, le dépôt traditionnel d’origine immémoriale jusqu’alors centré sur la pratique de l’art de bâtir, s’ouvrait à des conceptions et à des formes traditionnelles qui lui étaient demeurées extérieures.
La transformation de la Franc-Maçonnerie se réalisa selon des rythmes différents: plus rapide pour l’Europe et surtout la France, où les compagnonnages acceptèrent, dès le Moyen Age, des éléments extérieurs aux métiers, plus tardif en Angleterre, où il faut attendre le XVIIe siècle pour observer l’admission de maçons non opératifs. On peut penser que c’est surtout par le canal de la « Royal Society » que les effectifs des loges d’opératifs anglais se renouvelèrent et s’enrichirent de savants, de chercheurs et de nobles. En France, on peut supposer que l’interpénétration des templiers (dont l’Ordre fut aboli par le pape Clément V en 1312) et des constructeurs, a permis à ceux-ci de recevoir des éléments de la tradition islamique ésotérique recueillie auprès des musulmans par les moines soldats.
A la fin du XVle siècle, on relève la trace d’une confrérie secrète, les Rose-croix, attachés au maintien des pures conceptions ésotériques du christianisme, dont l’Église prétendait exprimer seule tous les aspects. Le Moyen Age, dont a affirmé un peu hâtivement qu’il n’avait été qu’une période d’obscurantisme, pourrait bien avoir été une nuit illuminée par des constellations aujourd’hui disparues, mais vivantes à l’époque. Alchimistes, kabbalistes, hermétistes, isolés ou groupés en petits cercles peuvent avoir transmis des éléments de leurs doctrines aux maçons constructeurs, dont la foi catholique s’accommodait fort bien de ces enseignements jugés hérétiques par l’Église.
A cette sommaire évocation du processus de sédimentation par lequel le fond opératif de la Franc-Maçonnerie a été renouvelé et modifié par l’apport des courants traditionnels mentionnés, il faut ajouter l’influence des événements politiques et religieux.
La naissance de la Franc-maçonnerie spéculative moderne
Les luttes religieuses ont ensanglanté l’Angleterre et appelé successivement au pouvoir des monarchies catholiques et reformées. La nation en a souffert cruellement, et a aspiré à une coexistence qui constituera précisément l’une des conditions et l’un des buts de la Franc-Maçonnerie.
En 1685, Jacques II succède à Charles II. Par son fanatisme religieux par sa volonté d’être « roi de droit divin », il dresse contre lui la partie non catholique du royaume qui le détrône. Réfugié en France en 1689, il s’établit à Saint-Germain, usant de l’hospitalité de Louis XIV. Des gentilshommes irlandais et écossais appartenant à sa cour, créent des loges dites « Jacobites », parce que dévouées à sa cause. Guillaume III d’Orange, prince protestant étranger appelé par les Anglais pour succéder à Jacques II, devient Maçon Accepté en 1694.
Le déclin de la Franc-Maçonnerie opérative, lié à celui de l’art de bâtir religieux qui lui avait jusqu’alors assuré son soutien, amène quatre loges londoniennes à se grouper et à s’agréger en un corps bien organisé, en 1717. La première obédience spéculative était née. En 1723, le pasteur presbytérien James ANDERSON, inspiré par son confrère protestant Jean-Théophile DESAGULIERS, rédige les Constitutions portant son nom. Il est intéressant de noter que tous deux semblent avoir été membres de la « Royal Society ».
Chapitre Premier des Constitutions de 1723 « Concernant Dieu et la Religion »:
« Un Maçon est obligé, de par sa Tenue, d’obéir à la Loi morale, et s’il comprend bien l’Art, il ne sera jamais Athée stupide, ni Libertin irréligieux. Mais quoique dans les Temps anciens les Maçons fussent tenus dans chaque Pays d’être de la Religion, quelle qu’elle fut, de ce Pays ou de cette Nation, néanmoins il est maintenant considéré plus expédient de seulement les astreindre à cette Religion sur laquelle tous les Hommes sont d’accord, laissant à chacun ses propres Opinions; c’est-à-dire, d’être Hommes de bien et loyaux, ou Hommes d’Honneur et de Probité, quelles que soient les Dénominations ou Confessions qui aident à les distinguer; par suite de quoi la Maçonnerie devient le Centre d’Union, et le Moyen de nouer une Amitié sincère entre des personnes qui n’auraient pu que rester perpétuellement Étrangères ».
Constituée en Grande Loge, pourvue de Constitutions fixant ses principes et ses règles, la Franc-Maçonnerie spéculative devait essaimer dans le monde et connaître des fortunes variables.
L’histoire des obédiences et des juridictions maçonniques des divers pays est aussi compliquée que passionnante. D’excellents ouvrages en montrent le développement et les étapes; aussi, laisserons-nous au profane plus particulièrement intéressé par cet aspect le soin de s’informer par de judicieuses lectures. Il lui suffira, pour l’instant, de se souvenir que la base de toute Franc-Maçonnerie est constituée par le rattachement à une Loge de Saint-Jean et une vie maçonnique intensément vécue, par le cœur et par l’esprit.
Que peut apporter la Franc-maçonnerie à l’homme de notre temps?
Le bénéfice que le franc-maçon retirera de son appartenance à l’Ordre maçonnique sera fonction de ce qu’il en attend, de ce qu’il est prêt à lui apporter, et surtout de la conception qu’il se fait de l’initiation. A tous les frères sincères, la fréquentation de la loge donnera le sentiment puissant de confronter ses opinions dans une atmosphère détendue et bienveillante. La pratique attentive de l’Art Royal facilitera la voie vers le perfectionnement et ouvrira le cœur et la pensée aux inspirations d’un enseignement de nature spirituelle, dégagé de toute contrainte dogmatique.
Que le profane se garde pourtant d’idéaliser la Franc-Maçonnerie, qui en tant qu’institution, ne vaut que ce que valent ses membres! Le franc-maçon n’est pas exempt de faiblesses, et l’initiation n’a pas le pouvoir magique de le délivrer de la myopie intellectuelle inhérente à la nature humaine. En revanche, elle peut l’éclairer sur lui-même, ses défauts et ses qualités, et lui apporter l’énergie de tendre sans relâche vers la perfection.
Le néophyte ne trouvera pas, en loge, de doctrine, de système, de réponse toute faite à ses préoccupations morales ou philosophiques. A cet égard, chaque frère est son propre maître, responsable devant sa conscience de ses opinions et de ses choix.
La Franc-Maçonnerie apportera des satisfactions morales et intellectuelles immenses au frère qui, malgré les faiblesses, les insuffisances qu’il remarquera autour de lui, saura ne pas perdre de vue le rôle et la mission de l’Ordre. En revanche, à celui qui limite ses ambitions à l’immédiat, au contingent, à l’apparence, à celui qui entend être servi plutôt que servir, elle n’apportera que déceptions et amertume.
C’est à vous, profane qui lisez cette notice, de savoir quel franc-maçon vous voulez devenir et quelle Franc-maçonnerie vous portez déjà en vous !
Darius GHIBLIM
LA FRANC-MAÇONNERIE DU GRAND ORIENT DE SUISSE
La Fayette, Joseph Bonaparte, Rouget de Lisle, Abd el Kader, Garibaldi, Joffre, ont été francs-maçons.
Voltaire, Goethe, Rudyard Kipling, Victor Hugo, parmi les écrivains,
Mozart, Franz Liszt, Jean Sibelius, Louis Armstrong, Duke Ellington, parmi les musiciens, ont été francs-maçons.
Gambetta, Jules Ferry, Aristide Briand, Félix Faure, Salvador Allende, Mario Soares, ont été francs-maçons.
Les frères Montgolfier, Charles Lindbergh, Henry Ford, André Citroën, ont été francs-maçons.
Benjamin Franklin, George Washington, Abraham Lincoln, Franklin Roosevelt, Winston Churchill, ont été francs-maçons.
En Suisse, Andreas Furrer, premier président de la Confédération Helvétique, Diethelm Lavater, Ruchonnet, ont été francs-maçons.
Plus près de nous, à Genève, un Georges Favon, un Adrien Lachenal, des Cramer, Duchosal, Fatio, Fontanel, Lullin, ont été francs-maçons.
Que des personnages aussi éminents, provenant d’époques, de milieux et de cultures aussi différents, aient décidé, à un moment de leur vie, de rejoindre les rangs de la grande fraternité maçonnique, démontre que cette institution a toujours attiré, pour des raisons jugées suffisamment convaincantes, les gens de valeur qui ont vu en elle une méthode efficace pour parfaire leur épanouissement et participer au devenir de l’humanité.
Dehors on se disait « Sergent, Monsieur, Salut, Salam »
Dedans c’était « Mon Frère » et ça ne faisait de mal à personne.
Nous nous rencontrions sur le niveau sous l’équerre
Moi, j’étais Second Expert dans ma Loge, la-bas!
(Extrait du poème « La Loge Mère » écrit par Rudyard Kipling en 1896)
De la méthode
En quoi consiste donc cette méthode apparemment miraculeuse ? Voici comment l’a décrite Pierre Tempels, dans son livre « Les Francs-Maçons », en 1888:
« Qu’on imagine une société qui formulerait ainsi ses statuts :
Art. 1 – La Société n’accepte aucune doctrine comme définitive ou comme sienne.
Art. 2 – Cependant, la Société provoque ses membres à l’examen de toutes les doctrines.
Art. 3 – Chacun de ses membres adoptera pour lui-même la doctrine de son choix, et sera libre d’y conformer sa conduite, sans que les autres aient rien à reprendre.
Mais alors, à quoi sert la société?
Dans la réponse à cette question apparaît la grandeur de l’œuvre maçonnique. Mon principe est au-dessus de toutes les vérités relatives, au-dessus de toutes les choses temporaires. Je m’adapte à tous les temps, à tous les peuples et m’accommode de toutes les circonstances transitoires. Je ne suis pas une des évolutions de la pensée humaine; je suis la chaîne qui les relie toutes. Les systèmes philosophiques, religieux et politiques sont des échelons; je suis l’échelle et la force qui fait monter d’un échelon à l’autre, je ne suis qu’une discipline ou une méthode; mais cette méthode est la clef du développement humain. »
De l’identité
Cette définition qui, plus de cent ans après, a gardé toute sa validité, montre l’abîme qui sépare la démarche maçonnique des sectes pseudo religieuses qui imposent leurs certitudes à des adeptes avides de vérités absolues. Le Grand Orient de Suisse condamne vigoureusement toute entreprise qui vise à asservir l’être humain, que cet asservissement revête un caractère physique, matériel, intellectuel ou spirituel. Pour lui, il est du ressort de chacun, à la suite d’une plus ou moins longue réflexion individuelle, d’adopter les conceptions métaphysiques qui se rapprochent le plus de ses sensibilités intimes.
Vu sous cet angle, la Franc-maçonnerie est bien l’héritière de tous les grands mouvements de pensée qui ont placé l’homme en particulier et par extension l’humanité dans son ensemble au centre de leurs préoccupations. Cependant, par le procédé initiatique de sa méthode, elle provoque en plus une puissance imaginative qui, par le biais de symboles, permet de faire le meilleur usage de ses capacités psychiques et facilite l’émancipation spirituelle.
Il ne faudrait pas croire pour autant que le bon franc-maçon vit détaché des contingences matérielles et se contente d’examiner de l’extérieur les événements contemporains, comme un scientifique étudie à travers son microscope les comportements d’espèces qui lui sont étrangères. Bien au contraire! Parmi bien d’autres choses, être franc-maçon c’est aussi, et peut-être même surtout, un état d’esprit. Par une attitude positive et une ouverture d’esprit propices à la recherche de solutions inédites, il s’efforce de participer, en fonction de ses choix personnels, à la compréhension et à l’évolution du monde dans lequel il évolue.
Du candidat
On trouve des francs-maçons provenant de tous les horizons. Le Grand Orient de Suisse accepte des candidats quel que soit leur origine, leur race, leur formation, leur profession, leurs croyances, leur statut social. Est-ce à dire que n’importe qui peut devenir franc-maçon? Certainement pas!
Le candidat idéal doit présenter un certain nombre de qualités et pratiquer des vertus morales sans lesquelles son admission au sein d’une loge se trouvera gravement compromise. Il doit être un homme d’honneur qui respecte la parole donnée. Il se conduit comme une personne responsable et fait preuve de disponibilité. Il n’est pas assujetti à des contraintes matérielles ou intellectuelles qui restreignent sa liberté d’action ou de pensée. Il aborde les problèmes avec une liberté absolue de conscience, ce qui implique, par voie de conséquence, qu’il accepte les opinions d’autrui, même s’il ne les partage pas. Il aspire à travailler son perfectionnement intellectuel et moral comme base de l’amélioration de la nature humaine. Il pratique la générosité d’âme et de cœur envers son prochain. Il est conscient du patrimoine culturel qu’il a hérité des générations qui l’ont précédé et est soucieux du sort de l’humanité. Il est prêt à lutter pour qu’elle se libère un jour des vices qui la rendent si imparfaite et des dogmes qui l’emprisonnent et la paralysent.
C’est pourquoi l’entrée dans une loge est précédée d’enquêtes qui visent à cerner la personnalité du requérant et les motivations qui sont à l’origine de sa démarche. Ces enquêtes sont suivies d’une audition pour s’assurer de ses capacités à s’intégrer au groupe et d’un vote très sélectif qui sanctionne l’appréciation des membres présents.
De I’idéal
On parle communément d’idéal maçonnique. Le terme n’est pas trop fort: l’idéal est un objectif que l’on se fixe tout en sachant pertinemment qu’on ne pourra jamais l’atteindre. Les ambitions du Grand Orient de Suisse répondent à cette définition: préparer la concorde universelle en proposant un centre d’union où des hommes de qualité peuvent se rencontrer.
Certes, les moyens mis en oeuvre peuvent sembler bien modestes au vu des objectifs à atteindre. Mais le devenir de l’humanité est une question beaucoup trop essentielle pour être confié sans contrôle à des individus qui sont au service d’idéologies partisanes ou qui doivent défendre des causes liées à leurs intérêts particuliers, quelle que soit la nature de ces idéologies et de ces causes. Il est indispensable que des hommes de bonne volonté se rassemblent en dehors de leurs activités habituelles pour se pencher sur tous les problèmes ayant trait à l’amélioration du bien-être des humains. « Bien-être » doit se comprendre ici dans le sens de « se sentir bien ».
Tu aimeras ton prochain comme toi-même est un adage cher à la FrancMaçonnerie, adage qui implique qu’on doit d’abord trouver une certaine paix intérieure si on veut pouvoir aider autrui.
L’être humain présente cette particularité d’être capable du meilleur comme du pire. L’actualité s’emploie à nous donner chaque jour des exemples du pire. La Franc- Maçonnerie, pour sa part, propose de cultiver ce qu’il y a de meilleur dans l’homme, de manière à le rendre moins imparfait. C’est sans doute ce qui explique la volonté de conciliation qui domine toujours les discussions en loge et qui rend les rapports entre frères exempts de ces confrontations égoïstes et néfastes si fréquentes dans les relations humaines.
Tous les hommes qui, préoccupés par l’emprise toujours plus grande du matérialisme sur notre société et ne trouvant plus de crédibilité satisfaisante dans les anciennes vérités théologiques, aspirent à de nouvelles voies de salut pour notre civilisation, devraient demander sans plus tarder leur adhésion à une loge du Grand Orient de Suisse. Certes, il existe des moyens plus rapides et surtout plus concrets de venir en aide à son prochain, mais il ne s’agit la plupart du temps que de solutions ponctuelles à des problèmes spécifiques.
La Franc-Maçonnerie, sans méconnaître cette forme d’entraide, vise cependant plus haut et plus loin: elle prétend perfectionner l’homme afin d’en faire à terme un « aideur » et non plus un « aidé », plus attaché à comprendre que d’être compris, à aimer que d’être aimé. En fait, on peut dire qu’elle aspire à dépouiller la personne du personnage, pour reprendre la fameuse distinction sartrienne.
Du secret
On a dit et redit que la Franc -Maçonnerie était une société secrète, avec tout le relent péjoratif qui s’attache à l’association de ces deux termes. En vérité, si cette épithète lui est encore si souvent attribuée, alors que la presse, la radio et la télévision lui consacrent de larges articles et émissions et que les ouvrages la concernant sont en vente libre dans toutes les librairies, c’est qu’elle entoure ses membres et ses travaux de la discrétion sans laquelle son comportement s’apparenterait à celui d’une activité profane. Vu sous cet angle, son « secret » se situe sur deux plans.
Le premier, c’est le secret qui protège l’identité des membres de l’association vis-à-vis du monde extérieur et qui entoure les discussions en loge, ce qui permet à chacun de s’exprimer en toute liberté d’esprit, en dehors de toute contingence liée au monde profane telle que professionnelle, sociale, politique, confessionnelle, en sachant que les propos tenus ne franchiront pas l’enceinte du temple et ne risquent donc pas d’être utilisés à des fins perverses et préjudiciable pour son auteur.
Le second, c’est ce qu’on pourrait appeler le secret de fabrication, qui toujours fait penser à ceux qui abordaient la Franc-maçonnerie de l’exterieur qu’on leur cachait quelque chose!
C’est en réalité l’influence progressive de l’expérience collective de la méthode maçonnique sur l’individu qui fait que même lorsqu’on a lu et approfondi tous ses aspects, on est vraiment franc-maçon qu’à la condition d’avoir participé assidûment au travail et à la vie de sa loge.
Des réunions
Mais alors, en quoi consistent précisément ces fameux « travaux » qu’on effectue en loge ? Ils sont de deux ordres.
Il y a la partie rituelle, qui recouvre l’ouverture, la fermeture, le déroulement de la « tenue », et bien évidemment les initiations des candidats aux trois premiers degrés pratiqués par l’Ordre et qui sont ceux d’apprenti, de compagnon et de maître.
L’ouverture et la fermeture constituent des mises en condition qui rappellent les objectifs poursuivis par la Franc-maçonnerie et les conditions de travail requises pour y parvenir.
Les initiations s’articulent essentiellement autour d’un psychodrame dont le postulant est I’acteur principal, d’un enseignement moral, adapté au grade, qui en découle, et de recommandations sur une ligne de conduite appropriée. C’est une porte que l’on ouvre sur l’esprit et qui incite à pénétrer à l’intérieur de soi pour faire l’état des lieux et se remettre en cause.
L’autre partie concerne les questions administratives inhérentes à la bonne marche de toute société et surtout, de loin le plus important, les conférences présentées soit par des membres de l’Atelier, soit par des orateurs choisis à lextérieur, conférences qui donnent lieu ensuite aux échanges d’idées sous la protection du secret que nous venons d’invoquer. Les sujets traités doivent bien évidemment présenter un intérêt, proche ou lointain, avec les nombreuses facettes du monde maçonnique.
Il y a aussi, et pour certains c’est même la motivation principale de leur participation, la chaude convivialité qui règne au sein d’une loge maçonnique et qui se cultive tout particulièrement lors des agapes qui suivent habituellement les travaux proprement dits. Il n’y a sans doute aucune autre association où les nouveaux adhérents, quel que soit leur « pedigree », sont intégrés et traités dès leur arrivée avec les mêmes marques d’amitié que tous les autres, comme des membres à part entière de la grande famille qui vient de les adopter.
Du fonctionnement
Le local dans lequel les francs-maçons se réunissent pour effectuer leurs travaux porte le nom de Temple. Il est tenu à l’écart des regards indiscrets, ce qui veut dire que l’entrée en est réservée aux adhérents. Y est presque toujours adjoint au moins une autre pièce qui porte le nom de Salle humide et où les frères se retrouvent avant et après les travaux et où ont lieu, si l’agencement le permet les agapes. Selon le rituel pratiqué, certaines loges n’utilisent le temple que pour les cérémonies et travaillent normalement en Salle humide.
La Loge est dirigée par un Collège d’officiers choisis parmi ses membres et comporte obligatoirement un président appelé Vénérable Maître, un Premier et un Deuxième Surveillants, un Orateur, un Secrétaire, un Grand Expert, un Maître des Cérémonies, un Trésorier, un Elémosinaire et un Couvreur. Les élections aux différents offices se déroulent chaque année lors de l’Assemblée générale. La cadence des réunions varie en général entre une fois par semaine et deux fois par mois. Les membres reçoivent en temps utile une convocation où est obligatoirement mentionné l’ordre du jour.
Les obligations financières des membres sont limitées aux droits d’entrée et aux cotisations annuelles qui sont du même ordre de grandeur que dans toute autre association. D’ailleurs, juridiquement, les loges sont des associations sans but lucratif qui sont assujetties, en dehors de leurs règlements particuliers, aux articles 60 et suivants du Code Civil Suisse. Elles se regroupent au sein d’une organisation faîtière appelée Obédience qui porte le nom de Grand Orient ou de Grande Loge. L’obédience fonctionne de la même façon qu’une loge avec un Collège formé de membres issus des loges. Ses pouvoirs sont plus ou moins étendus selon les prérogatives qui lui ont été attribuées. Elle tient chaque année une Assemblée générale appelée Convent. Il existe des obédiences purement masculines, d’autres purement féminines, et d’autres mixtes.
Les obédiences et les loges qui se rattachent à la Franc-maçonnerie libérale entretiennent entre elles des liens d’amitié qui se caractérisent par des visites réciproques. Chaque loge demeure cependant libre de choisir à qui elle veut accorder un droit de visite ponctuel ou permanent, étant entendu que les cérémonies rituelles ne peuvent être fréquentées que par des personnes initiées.
Des origines
Les sources auxquelles la Maçonnerie moderne s’est abreuvée sont multiples. Elles remontent au-delà de l’ancienne Égypte et de la Grèce antique pour se retrouver parmi les bâtisseurs de cathédrales et les ordres chevaleresques qui les ont imbibées au passage de la culture judéo-chrétienne.
C’est à Londres, le 24 juin 1717, jour de la Saint-Jean Baptiste, que quatre loges dont les membres ne faisaient pas partie des métiers du bâtiment décidèrent de se fédérer. Leur intention était de se doter de principes universalistes prônés par Locke et Newton dont l’ouverture d’esprit avait conquis les milieux culturels anglais. Cinq ans plus tard, en 1723, sortaient les fameuses Constitutions d’Anderson qui devaient constituer le nouveau livre de référence de la Maçonnerie moderne.
Hélas, cette entreprise généreuse par son humanisme et révolutionnaire pour l’époque par son libéralisme confessionnel ne devait pas durer un siècle. Bien vite, la Franc-Maçonnerie anglaise revint à des conceptions d’abord plus conformistes, puis franchement orthodoxes. En 1815, elle réinstaura le dogmatisme religieux en imposant à ses adeptes la croyance au dieu de la Bible et à sa vérité révélée.
Mais entre-temps, les idées nouvelles s’étaient propagées et des loges avaient vu le jour un peu partout à travers le monde. Beaucoup de francs-maçons ne virent pas d’un bon œil ce retour en arrière, surtout après l’émancipation des esprits provoquée par la Révolution française. C’est de cette époque que la Franc-Maçonnerie dite libérale a commencé à prendre ses distances pour finir, an nom du respect de la liberté de conscience, par refuser les consignes de « régularité » édictées par la Grande Loge Unie d’Angleterre en 1929, quand elle décréta l’exclusion de tous ceux qui ne reconnaissaient pas expressément le dogme chrétien ou même qui continueraient à fréquenter les obédiences non reconnues, parmi lesquelles figuraient bien évidemment toutes les structures féminines, la femme n’ayant pas droit de cité au sein de la maçonnerie anglaise.
La Franc-Maçonnerie libérale n’avait pas attendu cette décision pour ne plus se concentrer uniquement sur la protection d’une tradition certes des plus respectables et incrustée dans tons les esprits et même dans tous ses rituels, mais pour s’ouvrir largement aux réalités et aux besoins d’un monde en pleine mutation. C’est d’ailleurs grâce à cette nouvelle orientation qu’elle peut s’enorgueillir d’avoir été à l’origine de la plupart des grandes conquêtes sociales réalisées depuis deux siècles et dont l’exemple sans doute le plus significatif est constitué par la Déclaration universelle des droits de l’homme.
De l’avenir
De nos jours, ce qu’il est convenu d’appeler la Franc-Maçonnerie libérale compte quelques cent mille adhérents et se pratique presque exclusivement dans les pays sous influence culturelle néo-latine. C’est à la fois beaucoup et trop peu pour atteindre les objectifs qu’elle ambitionne à l’échelle de la planète. Un immense effort de promotion sera nécessaire pour faire connaître et partager des idéaux qui sont dans l’air du temps, du moins en Europe occidentale et correspondent, de par leur portée humaniste, aux aspirations d’un nombre grandissant d’individus.
Le Grand Orient de Suisse travaille dans cette voie et s’emploie à rechercher et recueillir tous ceux qui se sentent attirés par cette démarche et sont prêts à s’engager dans cette entreprise. Plus nous serons nombreux, plus nous serons actifs, et plus nous aurons de chances de favoriser l’avènement d’une humanité plus équitable et plus éclairée.
Grand Orient de Suisse
http://www.g-o-s.org/
CE QUE NOUS SOMMES ET CE QUE NOUS CHERCHONS
Nous voudrions vous parler sous ce titre, d’une famille souvent méconnue, celle des Francs-maçons.
En avant propos, nous pourrions dire, ne comptons-nous pas déjà assez de religions, de sectes, de philosophies?
Peut-être!
Mais la réalité est que la Franc-maçonnerie représente dans le monde une institution que l’on ne peut comparer à aucune autre.
Recherche de la Vérité
Nous nous assemblons pour chercher en commun la Vérité. La Vérité dans tous les domaines: le religieux et le social, le philosophique et le scientifique, l’art et l’histoire. Or, à cette recherche passionnée qui est bien digne de tenter les hommes de valeur, les Francs-maçons apportent une ouverture et une liberté d’esprit totale.
Les tenants d’une école scientifique appuient volontiers leurs convictions sur les travaux de leurs maîtres, les croyants, et rien n’est plus légitime, sur l’autorité de leurs livres et la valeur de leur credo. Nous entendons aller à la recherche de la Vérité sans qu’aucun dogme a priori, ne s’impose à notre esprit critique et sans qu’aucune borne de quelque sorte ne puisse nous barrer le chemin du vrai.
Chacun de nous doit trouver sa propre lumière, par la réflexion, la méditation, la lecture, l’exercice de la raison.
L’homme qui dépose sa candidature dans notre Ordre, devra tout d’abord longuement réfléchir et méditer sur la portée de sa démarche. Si cet homme est reçu parmi nous, nous lui demanderons tout d’abord d’apprendre à mieux se connaître, de peser seul avec sa conscience, les graves problèmes de notre monde et d’écouter avant de former et d’exprimer sa propre opinion.
Ainsi, les bases de la Maçonnerie sont-elles avant tout le perfectionnement moral et la recherche de la Vérité.
Imaginons le nouveau Maçon en contact avec les anciens, qui eux ont été reçus depuis longtemps. Le néophyte, en même temps qu’il pénètre dans une forêt de symboles qu’il approfondira longuement et interprétera selon sa tournure d’esprit et son propre entendement, assiste à des exposés, des conférences, des discussions, des cérémonies entre Francs-Maçons. Obligatoirement, si étendue que soit sa culture, il se rend compte que bien des problèmes ne l’avaient encore jamais effleuré, et si tel devait être le cas, que bien des aspects lui avaient échappés.
Cette recherche de la Vérité à laquelle nous consacrons notre vie, voilà qu’avec le temps, elle se montre toujours plus ardue et plus difficile à atteindre. Ce que les vieilles cosmogonies avaient présenté avec superbe, est-ce que le progrès de la connaissance ne l’ébranlent pas dangereusement? La science même va d’explications provisoires en hypothèses ingénieuses souvent démenties le lendemain. Les philosophies les plus hautes ont toutes leurs limites. Arrivés à ce stade de la réflexion, nous pouvons dire que si le Maçon comprend que la Vérité est sans doute une, on peut, tel le fragment de droite aperçu sous différents angles, en concevoir différents aspects pareillement valables. Qui a tout à fait tort ou tout à fait raison? Alors le Maçon qui a compris et assimilé ces choses s’élève sur le plan de l’éthique individuelle et sociale. Il accède à la notion de la Tolérance, notion très difficile, mais indispensable dans une société civilisée.
Imaginons qu’un membre d’une Loge vienne exposer, non sans talent, des idées opposées à celles de ses Frères, qu’il révèle une conception du monde qui les heurte violemment. Nous devons rester alors dans le domaine de la réflexion pure et avant de lui répondre, nous devons penser que cet homme est de bonne foi, que lui aussi a réfléchi, lu, comparé, peiné, pensé, cherché. Pourquoi sa solution serait-elle « a priori » inférieure à la nôtre? Voilà ce qu’est la démarche d’esprit Maçonnique. Dans une autre société, deux esprits antagonistes pourraient devenir des ennemis. Or un Maçon n’est jamais l’ennemi d’un autre Maçon. Il peut penser que l’autre est dans l’erreur, mais chacun respecte les convictions de l’autre en pensant que la liberté personnelle de l’un se termine là où commence celle de l’autre.
Fraternité
Tous les maçons n’ont pas les mêmes opinions, les mêmes croyances ou les mêmes tendances. Ceci est très important, car le monde serait bien triste et monotone si tous les esprits étaient fabriqués en série, sur le même modèle et pensaient tous de la même manière. La diversité de nos points de vue n’exclut jamais la courtoisie dans nos rapports réciproques, ni l’estime que les uns portent aux autres. La Tolérance nuancée de cordialité nous conduit à la Fraternité. Tous les Maçons se sentent fraternellement unis; cela va même plus loin, ils se sentent de la même famille, de celle qui ne veut opprimer aucun de ses membres. Alors nous avons la joie de nous appeler FRÈRES.
Les Francs-maçons sont des hommes comme les autres et ils n’atteignent pas toujours et de loin, les hauteurs spirituelles qu’ils se proposent pour but. Mais du moins y tendent-ils de toute leur volonté et de toutes leurs forces.
Toute Loge se réjouit d’un succès de carrière, d’un événement familial heureux, d’un succès remporté par un de ses membres, comme tout Frère ressent comme une peine personnelle, le deuil ou le malheur d’un Frère. Il est facile de comprendre, qu’un milieu aussi libéral dans sa recherche et aussi chargé de bienveillance dans son action quotidienne, attire à la fois les cœurs ardents et les grands esprits. C’est que chacun, d’où qu’il vienne, se sent à l’aise dans l’Ordre Maçonnique, car il est le gardien des Traditions passées.
Toutes les religions, tous les ésotérismes, toutes les hérésies aussi, toutes les mystiques, toutes les recherches métaphysiques reflètent sans doute une part de Vérité et, sous leur apparence contingente à telle ou telle époque de l’humanité, une part de l’absolu. Loin de railler ou de s’en faire un adversaire, le Maçon recueille pieusement toutes les Traditions. I1 sait que le monde n’a pas commencé avec lui et que la beauté d’une civilisation est due d’abord au pénible effort de toute une chaîne d’humains qui l’ont précédé.
Il sait que la vie est brève, qu’elle n’est qu’un cycle, qu’elle ne représente qu’un instant entre hier et demain. Son ambition est de travailler à ce que le monde futur soit plus accueillant, plus lumineux, plus humain que celui que nous connaissons actuellement. Pour mieux y arriver, loin de s’enfermer dans la Tradition, le Maçon prend appui sur elle pour construire. Car si nous sommes Francs, nous sommes d’abord Libres. Ainsi, la Franc-maçonnerie connaît-elle le singulier bonheur d’être à la fois un laboratoire d’idées et un terrain où on peut les appliquer. Ce travail en commun, l’idéal qui nous domine et l’espoir qui nous soulève font naturellement tomber toutes les barrières que les circonstances ont élevées entre les hommes. Dans nos Loges on peut voir fraternellement mêlés, l’homme simple et le savant, le circoncis et l’incirconcis, le blanc et le noir, l’humble et le riche, l’étranger et le national, le croyant l’agnostique et l’athée. Quelle autre institution pourrait-elle réaliser, dans l’harmonie, un pareil brassage?
Humanisme
S’il existe, après tant de querelles, après tant de guerres, une aspiration profonde qui représente notre idéal Maçonnique, c’est bien celle que nous désignons du nom d’humanisme. Sentir qu’il existe en chaque être humain une dignité à tous les échelons, sentir et comprendre que si dissemblables que puissent être encore aujourd’hui les états et les peuples, que tous les hommes ont quelque chose de commun, beaucoup plus fort que ce qui peut les diviser. Notre Ordre, ouvert à toutes les doctrines, mais qui n’en impose jamais, peut sans dérision parler d’humanisme. C’est pourquoi, malgré que nous soyons divisés sur certains sujets, nous sommes unanimes dans notre amour passionné de la PAIX. L’ambition de notre Ordre Maçonnique est très haute. Il veut non diviser, mais rassembler ce qui est épars. Il rêve d’étendre un jour à l’humanité entière, la liberté et la dignité qui feront de la famille humaine, une famille heureuse et unie.
En conclusion, la Maçonnerie sert à effacer l’inimitié des nations, la différence des âges, celle des goûts; elle réunit par la pratique de la morale qu’elle enseigne, ceux qui sont les plus éloignés par les préjugés et par la division de leurs intérêts. Un bon Maçon est le Frère de tous les hommes, l’ami de tous les gens de bien. L’indigence et la vertu ont les premiers droits sur son cœur, droits sacrés par le serment que nous prêtons, et dont chacune de nos assemblées nous retrace la leçon; sa charité s’étend sur tous les malheureux.